Atacama, un désert sous une pluie d’étoiles

Ambiance de l'Atacama avec Awasi © Awasi
Ambiance de l'Atacama avec Awasi © Awasi

Miguel a neuf ans et vit dans un petit village, à quelques dizaines de kilomètres de San Pedro de Atacama, au Chili.
Miguel a neuf ans. Il n’a jamais vu la pluie !
Tous les déserts ont leur particularité. L’Atacama a choisi d’être le plus aride, en offrant au monde des paysages spectaculaires, comme venus d’une autre planète. Certains disent que l’Atacama ressemble à Mars quand ses roches se teintent de rouge. Ses volcans et les fumerolles de ses geysers pourraient tout autant évoquer Vénus. À moins qu’il ne s’agisse de la planète naine Cérès, avec ses lacs sursaturés en sel.
Disons plutôt que ces paysages nous plongent hors du temps et de l’espace, vers un inconnu extraordinaire.
Et si ses jours sont faits de mirages, ses nuits étoilées comme nulle part ailleurs incitent à la rêverie.

Ceux qui aiment les déserts ont des clichés de l’Atacama en tête. Cimes enneigées surgissant derrière des vallées rouges orangées, flamants roses sur la lagune Chaxa, étendues de sel sous un ciel bleu roi sont les « cartes postales » de l’Atacama. Elles rivalisent avec celles des cieux étoilés saisis sur le « toit du monde », à cinq mille mètres d’altitude, et avec celles des geysers du Tatio, connu comme l’un des plus vastes sites de sources chaudes au monde.
Une fois sur place, les geysers, les roches rouges, les étendues de sel et les volcans enneigés sont bel et bien présents. Mais rien n’est tout à fait pareil, tout se teinte d’irréel, tout devient magique, surnaturel. Comme un voyage dans une quatrième dimension, qui nous ferait quitter l’espace-temps de la planète Terre.
Alors que certains paysages demandent du temps pour que le voyageur s’imprègne de toute leur Majesté, l’Atacama assène immédiatement un uppercut au visiteur du jour. Un vrai choc ! Jamais les paysages n’ont semblé si vastes, les couleurs si pures. Même le silence est parfait. Les seuls décibels perceptibles sont ceux des battements du cœur. Il ne reste qu’à se laisser saisir, en silence, heureux de perdre ses repères.

À quoi la magie tient-elle ? Peut-être à la pureté de l’atmosphère, qui parait jeter un voile cristallin sur l’infini des étendues rouges, sur les volcans, sur les lagunes et marais salants. La vue porte à des dizaines de kilomètres. Ici, l’air est d’une densité si étrange qu’il en déforme la vision. Un des rares endroits sur Terre, avec l’Antarctique, où il soit possible d’éprouver la même sensation.
Au royaume des mirages, l’Atacama est Roi.
Sur cette drôle de planète, le temps, l’espace et le mouvement perdent leur consistance. Le 4×4 a beau rouler à vive allure pour rejoindre l’un des nombreux sites de visite autour de San Pedro de Atacama, on a presque l’impression de rester immobile. Les kilomètres ont beau s’afficher au compteur, les montagnes et les volcans au loin ne s’approchent jamais. Ils restent figés à la même place, indifférents à nos tentatives de déplacement. Ils semblent nous observer, éternellement sereins et vaguement goguenards.

L’Atacama, planète magique et minérale… Où que l’on porte le regard, tout n’est que beauté surnaturelle. Le volcan Licancabur, « montagne du peuple » en quechua, est toujours à portée de vision, surveillant de loin les étendues blanches du Salar de Atacama. Le deuxième plus grand lac salé au monde projette une lumière si vive qu’il trouble la vue, comme pourrait le faire une étendue de neige. Là encore, les repères se brouillent. Sommes-nous bien dans le désert le plus aride du monde ou dans la poudreuse des Alpes ? Les 40° de la température ambiante rappellent que nous sommes bel et bien dans l’Atacama, tout comme les flamants roses aperçus au loin, tout comme l’odeur de chlorure qui émane des croutes saumâtres bordant l’étendue de sel. Puis, soudain, les flamants se dissolvent dans l’air, pris dans un mirage. Les sommets enneigés restent de marbre – ou de glace – : ils sont si haut que la chaleur ne peut les atteindre.
La magie touche son paroxysme quand, au petit matin, à près de quatre mille deux cents mètres d’altitude, on assiste au lever du soleil sur les geysers de El Tatio…
Au départ de San Pedro, à 4h du matin, la température est négative et des millions d’étoiles sont autant de réverbères qui illuminent le ciel. Les nuits sont rarement sombres au pays de Miguel !
À l’arrivée, juste avant l’aube naissante, tandis que les geysers glougloutent, la planète minérale s’entrouvre, met à nu ses entrailles, laisse échapper des fumerolles et jets d’eau brûlants. Elle gronde en expulsant ses éléments. On se prend à penser qu’elle donne naissance à de nombreux enfants, qui se feront pierres, volcans, sels. Et l’on assiste heureux à ce spectacle, légèrement essoufflé, car l’oxygène se fait plus rare à cette altitude.
Les érudits se souviennent alors que l’Atacama est un paradis pour les scientifiques en quête des origines de la vie. Ils ont découvert ici des cyanobactéries parmi les plus primitives du monde, capables de survivre en colonisant les roches.
Le désert de l’Atacama ou le miracle des roches qui donnent naissance à la vie…
Une noce minérale.

© Texte : Karine Welter
© Photos : Awasi Atacama & Shutterstock

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